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Quel chauffage pour une maison passive





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 Une maison passive, est-ce une maison sans chauffage?


On présente souvent une maison passive comme une maison sans chauffage, notamment à des fins marketing. C’est évidemment faux et ça montre surtout une méconnaissance du fonctionnement d’une maison passive.


 Je vous rappelle l’objectif que le PHI s’est donné en mettant au point le principe de maison passive : Supprimer le chauffage central, pas très efficace et très consommateur d’énergie. Et ceci en minimisant les pertes et en maximisant les apports passifs. Les apports passifs sont de plusieurs types : le principal est évidemment l’apport solaire, la plus grande source d’apport calorifique dans une maison passive. Vous avez ensuite les apports générés par les habitants eux-même (de l’ordre de 80W/habitant) Alors, ça peut paraître faible mais c’est non négligeable. Puis vous avez les déperditions de vos appareils : électriques, de cuisson, de production d’eau chaude, les douches. Ces apports suffisent une grande partie du temps mais dans certaines situations, ils ne seront pas suffisant. D’ailleurs l’objectif principal théorique à atteindre est une consommation de chauffage de 15kWh/m²/an, il n’est pas de 0. Il y a donc nécessairement un apport très faible mais réel qui est généralement calculé d’une puissance de l’ordre d’une dizaine de W/m², soit l’équivalent d’un petit radiateur électrique pour une maison standard. Tout ça c’est en théorie mais en pratique, ça ressemble à quoi?


Quand on interroge les habitants de maisons passives, ils vous disent qu’ils utilisent très peu leur moyen de chauffage, et surtout bien en dessous de ce qui était théoriquement calculé. Pour expliquer cette différence, il y a trois pistes : la première est que le PHPP est conçu avec une rigueur sans concession et qu'il aurait tendance à surestimer les besoins de chauffage. Ce n’est pas tout à fait vrai : il est très précis aussi bien sur les apports que sur les pertes énergétiques mais il est organisé de sorte à prendre par défaut les paramètres les plus défavorables. Si vous voulez les améliorer, il faut travailler pour les justifier. Et avec une maison bien conçue on accède assez facilement à l’objectif passif sans qu'il soit nécessaire d’aller rechercher des paramètres permettant d’améliorer encore le score. Donc si vous atteignez facilement l’objectif dans le PHPP, il y a fort à parier que la réalité sera encore meilleure.

Ensuite une maison passive a une très bonne constante de temps, c’est à dire qu’elle ne perd que très lentement sa chaleur, même sans apports. Une bonne valeur est de 200h, c’est à dire qu’il faut environ 8 jours pour diviser par deux l’écart de température avec l’extérieur. S’il fait 5° en moyenne dehors, au bout de 8j, il fera encore 12,5° à l'intérieur sans aucun apport. Donc cela suffit à amortir les petites variations (entre le jour et la nuit, ou lors de modifications rapides de la météo) sans qu’il soit nécessaire de chauffer.

Enfin la dernière piste est peut-être la piste subjective : le confort d’habiter une maison passive est tel qu’on sous-estime l’utilisation du chauffage par un biais cognitif classique : le cerveau veut se prouver qu’il a fait le bon choix.


Il est donc important de s’appuyer sur des mesures objectives pour analyser le comportement d’une maison passive. Et c’est ce qu’a fait le PHI lors de ses premières réalisations, notamment les maisons en bande de Hanovre en Allemagne : une vingtaine de maisons toutes identiques collées les unes aux autres. Excepté les deux maisons à chaque bout, toutes les autres maisons avaient rigoureusement les mêmes caractéristiques et donc la même performance attendue. Ils ont donc pu mener plusieurs campagnes de mesures de consommation d’énergie annuelle dont les résultats sont sur ce tableau.


Et ce qui choque tout d’abord c’est l'extrême dispersement des résultats : on a une consommation réelle qui s’échelonne de 5 à 30 kWh/m²/an.


Alors comment expliquer ces fortes disparités alors qu’elles ont été modélisées pour être passive donc ne consommer que 15 kWh/m²/an? En fait, Il n’y a qu’un seul paramètre qui change … : Leurs habitants. Il y avait des jeunes couples, avec ou sans enfants, plus ou moins grands, des personnes âgées, des gens présents sur place ponctuellement ou tout le temps. Bref des rythmes, des besoins et des habitudes très différents. Cependant, si on fait la moyenne de ces consommations, on obtient … 13kWh/m²/an


C’est une évidence à rappeler mais c’est d’autant plus important pour ce type de maison  : La consommation d’une maison passive dépend de la manière dont on l’habite. Il y a une petite histoire qui circule sur une des premières expériences en France : Un couple avec deux enfants qui ont parfaitement vécu dans leur maison passive … les enfants ont grandi, ils sont partis de la maison, … et les parents ont eu froid. Les apports internes ont en effet diminué, déséquilibrant le bilan global.


Un petit apparté sur la température de confort utilisé dans le PHPP. On connait tous les campagnes de communication pour les économies d’énergie qui rabâchent depuis des décennies que la température de confort est à 19°C. C’est d’ailleurs cette température qui est utilisée dans les logiciel de calcul conventionnel comme celui de la RT actuelle. Or les études menées par le PHI montrent que la grande majorité des gens jugent une température confortable à ...20°C. Et c’est donc cette température qui est retenue comme minimum à garantir dans une maison passive. Aux frileux qui pensent que 20° n’est pas suffisant, je répondrait qu’en grande majorité un besoin d’une température plus élevée vient surtout de l’inconfort de la maison : des contrastes de températures forts entre pièces, des parois vitrées froides qui rayonnent, des courants d’air, tous ces éléments concourent au sentiment d’inconfort et poussent à augmenter la température pour compenser. Hors dans une maison passive, tous ces points sont supprimés et donc 20° est généralement largement suffisant.


Maintenant je vous propose de regarder deux graphiques générés par le PHPP d’une maison passive : ceux de l’onglet besoin de chauffage qui résume les gains et les pertes et donc en déduit la différence à compenser par le chauffage.

Le premier montre la différence entre les apports et les pertes mensuels, c’est à dire le besoin de chauffage mensuel. Vous remarquerez qu’il se concentre exclusivement sur 4 mois de l’année, le reste du temps les apports compensent largement les déperditions.

On remarque aussi que les apports solaires sont largement excédentaires, sur les mois d’été, on s’en serait douté mais c’est aussi largement le cas sur toute l’intersaison.


Regardons maintenant le bilan des pertes et des gains par poste.

A gauche les pertes, à droite les apports. Un certains nombres de ces postes sont figés par les choix faits sur la maison : En bleu les pertes par les parois opaques, en jaune de part et d’autre les pertes et les gains par les menuiseries. On voit bien que l’apport solaire représente la majorité des apports, de l'ordre des ⅔, mais sur ce graphique, il y a une chose très intéressante à remarquer : On a un besoin de chauffage de 9,5 kWh/m²/an et des apports internes de 13,3. Ce chiffre caractérise la manière dont les habitants utilisent la maison. Il est normé sur une utilisation moyenne mais il représente un nombre de kWh bien supérieur à celui du besoin de chauffage donc les variations d’usage vont avoir un impact non négligeable sur le besoin de chauffage. Par exemple, une famille qui cuisine beaucoup (four, plat qui mijote longuement, etc…) va avoir des apports internes largement supérieurs à celle qui réchauffe ses plats au micro-onde. De même l’utilisation de matériel électrique avec une grosse consommation et donc de production de chaleur (regardez la photo de ma box prise à la caméra thermique).


De même, regardez en blanc les besoins de chaleur non utiles. Ce sont les apports qui ne servent pas, par exemple la belle journée ensoleillée d'hiver qui va faire monter la température à + de 20°. Cette chaleur en trop est considérée comme perdue mais si on peut en stocker une partie, notamment dans des parois lourdes par inertie, elle pourra être utilisée plus tard, réduisant d’autant les besoins de chauffage. Ce cas est prévu par le PHPP mais est très simplifié. Il faudrait faire appel à des bureaux d’études thermiques et à des simulations dynamiques pour modéliser le comportement des parois lourdes et ce n’est pas l’objet du PHPP, logiciel de dimensionnement. Cependant cette quantité de chaleur est significative et donc en récupérer une partie par l’utilisation des bons matériaux est significatif dans le bilan final.


Bref, les besoins de chauffage, même s’ils sont faibles, sont grandement impactés par la manière dont on vit dans une maison passive. Il est donc impossible à priori de définir précisément les apports complémentaires qu’il va falloir mettre en place. Mais pas de panique, je vous rappelle que pour les couvrir, la puissance maximale nécessaire est très faible : de l’ordre de 10W/m², soit environ 1500W pour une maison standard, la puissance de la bouilloire, du grille-pain ou du sèche-cheveux. Donc vous aurez largement de quoi apporter ce besoin de chaleur sans investir dans un coûteux moyen de chauffage. Oubliez donc les pompes à chaleur et les planchers chauffants.


Donc comment on chauffe une maison passive!


On a deux possibilités : soit un système de chauffage réparti (un chauffage dans chaque pièce), soit un système centralisé qu’il faut distribuer. Mais je rappelle que l’objectif d’une maison passive est justement de se passer d’un système de chauffage central. Pour autant on a un réseau disponible : celui de la ventilation double flux, donc une solution de distribution de chaleur grâce au renouvellement d’air. Mais si vous avez suivi mes précédentes video, vous devez maintenant savoir que l’air ne peut pas contenir beaucoup de chaleur. Cependant, on peut augmenter la chaleur apportée par l’air en jouant sur 2 paramètres ; la température et la vitesse de l’air. Mais on est limité car il faut que ça reste confortable. On a tous déjà expérimenté l’inconfort des chauffages d’entrée de magasin : beaucoup d’air très chaud qu’on fuit très vite.


Faisons un petit calcul. Notre maison de 100m² et 250m3 a un renouvellement d’air de 0.4 vol/h, soit 100m3 par heure. Il fait 0° dehors, la VMC réchauffe l’air jusqu’à 18°.

On considère qu’au dessus de 30° d’écart avec l’air ambiant, l’air soufflé sera inconfortable (Quand on approche de 50°c, la différence avec la température de la surface de notre corps est trop importante..)

La capacité thermique volumique de l’air est de 0,34W/m3.K

Donc au maximum on pourra distribuer une puissance 100x0,34*(48-18) = 1020 W, soit 10 W/m² de puissance de chauffage. Ce chiffre est à retenir : on ne peut pas distribuer de manière confortable plus de 10W/m² de chauffage par la ventilation double flux. Pour calculer le besoin maximum de chauffage, le PHPP simu le deux conditions météo extrêmes : une longue semaine pas trop froide mais au temps gris : peu de déperdition mais peu d’apport et une semaine très froide mais ensoleillée : beaucoup de perte et d’apport. Dans la maison montrée précédemment le calcul donne environ 12W/m². On est au dessus des 10W/m² (c’est du dans ce cas précis à un grand vide sur salon donc un volume d’air plus important pour une même surface) On ne pourra donc pas compter que sur la ventilation double flux. Il faudra un complément, certe très faible (imaginez : 200W pour une maison de 100m² : c’est un peu plus de ce que consomme une télévision par exemple)


Toutes les ventilations DF de qualité on en standard ou en option une résistance chauffante sur l’air soufflé, qui varie de 900 à 3000W selon les modèles, mais utiliser la VMC pour distribuer le chauffage a un autre inconvénient : l’air est à la même température partout alors qu’on préfère généralement 17°-18°C dans une chambre pour dormir, 20° dans les pièces à vivre et puis 22° dans la SDB au moment de prendre sa douche. Apporter de la chaleur ponctuellement à l’endroit et au moment où on a besoin semble donc être plus judicieux. Un simple petit radiateur soufflant dans la salle de bain pour les rares fois où il fait froid, éventuellement un radiateur électrique discret dans le salon.


En fait le problème c’est que vous ne savez pas à priori quel type d’habitant vous allez être : plutôt du côté des 5kW/m².an ou plutôt du côté des 30? Donc par précaution on aura tendance à surdimensionner le chauffage à la conception en mettant des radiateurs un peu partout au cas où.


Je vais vous donner un petit conseil : Habiter une maison passive, ça s’expérimente et n’ayez donc pas d’à priori : Vivez dedans avant de faire des choix définitifs : Utilisez tout d’abord la capacité de la ventilation à réchauffer un peu l’air entrant en réglant sa consigne plutôt basse (par exemple 18°, c’est la température minimum que vous aurez partout), ajouter un petit soufflant dans les salles de bains, soit fixe, soit rangé dans un placard à sortir quelques semaines dans l’années. celui là sera certainement nécessaire pour avoir chaud au moment de votre douche ou du bain des enfants mais prenez le plus petit modèle, et le plus simple : pas besoin d'accumulation ou de gestion électronique compliquée: vous voulez juste de la chaleur rapidement dans une petite pièce. Pour la pièce à vivre, ça va vraiment dépendre de vous, mais je vous conseille la première année de ne pas installer de radiateur. Achetez un petit radiateur portable que vous rangez au garage le reste du temps. Il vous permettra de voir votre besoin réel, et installez un radiateur fixe plus tard si c’est nécessaire. Il vous suffit de prévoir une arrivée électrique en attente au bon emplacement. En fait, apprenez à vivre dans votre maison et soyez pragmatique.


Je ne peux pas parler de chauffage en occultant le chauffage bois : les cheminées, les poêles à bûches et à pellet.


Réglons tout de suite le cas de la cheminée ouverte : outre un rendement très médiocre, elle est parfaitement incompatible avec une bonne étanchéité à l’air et perturbera fortement l’équilibre de votre double flux : donc à proscrire. Si vous aimez vraiment le feu qui crépite, réservez-le en extérieur sur un braséro pendant les soirées fraîches d’intersaison.


En ce qui concerne les poêles, il faut qu’ils soient parfaitement étanches et alimentés par un air extérieur mais le problème n’est pas là. En effet, si la puissance de chauffage maximum est de l’ordre de 10W/m², il faut donc un poêle de 1,5kW maximum pour une maison de 150m² et encore il ne fonctionnerait à cette puissance que quelques jours par an. Or les plus petits poêle à pellet ont une puissance minimum de l’ordre de 2,5kW et c’est encore pire avec un poêle à bûches qui doit fonctionner à pleine puissance pour une bonne combustion soit difficilement en dessous de 5kW. Ces poêles sont donc bien trop puissants. Par exemple, mes bureaux font 150m²,  sont légèrement au-dessous du passif, manque d’apports (pas de cuisine, occupation intermittente  et peu de douche) et mon poêle à granulé consomme de l’ordre de 15 sacs de pellets sur un hiver, soit 75kg alors que l’entretien est programmé à 1000kg : je ne l’ai toujours pas fait depuis 2012.


Vous l’avez compris, l'utilisation d’un poêle dans une maison passive est l’équivalent d’un canon à tuer les mouches : bien trop surdimensionné. En fait, il n’aurait d’intérêt qu’en cas de besoin d’une forte relance, par exemple dans le cas d’une maison peu occupée comme une maison secondaire ou alors un gite avec de fortes variations du taux d’occupation.


En conclusion, une maison passive a peu de besoin de chauffage. En général, l’inertie de la maison suffit à amortir les petites variations entre le jour et la nuit par exemple. Cependant, dans certaines conditions limites (peu de soleil ou un grand froid) le besoin de chauffage est réel même s’il est faible . C’est à vous de définir comment apporter ces quelques calories manquantes selon votre façon de vivre au quotidien. Prenez le temps d’expérimenter quelques saisons avant de choisir vos moyens de chauffage. Dans tous les cas, ils seront économiques aussi bien à l’achat qu’au fonctionnement, car seront très peu utilisés. Les radiateurs électriques très souvent décriés redeviennent très intéressants. Et si vous avez des scrupules à utiliser l'électricité pour ce petit besoin, quelques panneaux solaires bien orientés produiront largement plus que ce que vous consommerez en une année.



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